Pèlerinage juif au Maroc : rabbi Pin’has Ha-Cohen, le saint sauveur du Pacha El Glaoui

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Vénéré par les Juifs et respecté par les musulmans, l’histoire de rabbi Pin’has Ha-Cohen n’est pas comme les autres. Fils de rabbi Benyamin Hacohen Azogh et petit-fils de rabbi David Ben Baroukh, il a vu le jour dans le Souss, où il grandira en étudiant la Torah. C’est là-bas où il avait l’habitude de se promener dans les villages et villes, à dos de sa jument pour recueillir l’aumône et les dons aux écoles et aux Juifs marocains les plus démunis.

En fait, compte tenu de sa descendance, l’histoire raconte que plus tard, avec d’autres saints juifs, il s’est occupé de la récolte de Marrakech et la partie nord du royaume.

Et derrière son décès et son inhumation à Marrakech, toute une histoire racontée notamment par Issachar Ben-Ami, dans « Saint Veneration Among the Jews in Morocco » (Editions Wayne State University Press, 1998). Il y rapporte, en effet, que rabbi Pin’has Ha-Cohen était arrivé à Marrakech, à dos de jument à Marrakech pour la première fois. Ayant appris que ce saint était en ville, et incité par ses conseillers à prendre possession de la belle jument de ce rav, le pacha de Marrakech, Thami El Glaoui demande à ce qu’il soit amené devant lui. Mais son hôte, Yeshou’a Corcos refuse, demandant aux émissaires du puissant pacha de se rendre dans son écurie et prendre tout ce qu’il y avait, sans toutefois toucher à la jument de son invité. S’en suivent alors plusieurs allers retours des gardes d’El Galoui.

Le tombe de Rabbi Pinhas Ha-Cohen au cimetière israélite à Marrakech. / DRLe tombe de rabbi Pin’has Ha-Cohen au cimetière israélite à Marrakech. / DR

Recevant l’ordre de leur maître, les hommes du pacha finissent par envahir l’écurie pour s’approprier la jument. Il le trouve ainsi, selon la légende, «rempli de serpents». «Ils avaient tellement peur parce que les serpents voulaient avaler les messagers. Ils sont revenus au pacha», qui aurait fini par se rendre lui-même sur place pour constater les faits de visu.

El Glaoui renonce à s’approprier la jument de rabbi Pin’has l’invitant même à s’installer à Marrakech. «Traversez la ville de Marrakech et (choisissez) la maison que vous aimez, je vous la donnerai», lui aurait-il lancé.

Rabbi Pin’has et les tentatives d’assassinat d’El Glaoui

La relation entre les deux hommes changera au fil du temps. «Rabbi Pin’has Ha-Cohen, petit-fils du rav David Ben Barukh a sauvé plusieurs fois la vie du pacha de Marrakech», écrit-on dans «Jewish Folklore and Ethnology Review, Volumes 12 à 15» (Editions Simon Bronner, 1990). Rapportant que ce saint «avait le don de prophétie», l’ouvrage raconte comment rabbi Pin’has Ha-Cohen aurait averti le pacha de Marrakech de complots destinés à l’assassiner. «Une fois, il a dit au pacha de ne pas boire le café que sa servante lui avait apporté ; le saint a donné le café à un chat qui est tombé mort à ses pieds», précise-t-on.

Une autre fois, le pacha devait aller prier un vendredi dans la mosquée de la Koutoubia. «Le pacha et le roi ont été impliqués dans une querelle et les hommes du roi ont prévu de tuer le pacha en le poignardant dans le dos pendant la prière dans la mosquée», poursuit l’ouvrage. Rabbi Pin’has rend alors visite à El Glaoui, la veille, pour lui faire part d’un rêve qu’il aurait fait. «Il (le pacha El Glaoui) dépêche alors un sosie en remplacement et quand un homme est venu et a tenté de le poignarder dans le dos, les hommes du pacha l’ont arrêté.»

Cimetière israélite à Marrakech. / DRCimetière israélite à Marrakech. / DR

Issachar Ben-Ami précise que la légende raconte que rabbi Pin’has avait l’habitude de «voir son grand-père apparaissant dans ses rêves et lui révélant si telle ou telle chose arriverait».

Rabbi Pin’has Ha-Cohen est décédé à Marrakech le 12 janvier 1952 (14 Tebet 5712). Le jour de ses funérailles, on raconte que toute la ville était mobilisée lors d’un samedi extrêmement pluvieux. Il est inhumé au cimetière israélite de Marrakech et sa tombe continue d’attirer des pèlerins juifs de plusieurs coins du monde.

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