Trump a gagné son pari face à la Corée du nord

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A combination photo shows U.S. President Donald Trump in New York, U.S. September 21, 2017 and North Korean leader Kim Jong Un in this undated photo released by North Korea's Korean Central News Agency (KCNA) in Pyongyang, September 4, 2017. REUTERS/Kevin Lamarque, KCNA/Handout via REUTERS/File Photos

AFP
La réaction de la Corée du Nord à l’annulation du sommet sur le nucléaire montre que Trump a gagné son pari !

INTERNATIONAL – Il est heureux que la Corée du Nord n’ait pas réagi à la décision de Donald Trump d’annuler le sommet de Singapour sur le nucléaire par une diatribe assassine ou, pire, l’envoi d’un missile. L’éventualité d’un futur sommet avec le président des Etats-Unis semble donc toujours envisageable, comme l’ont sous-entendu les deux dirigeants, et les relations diplomatiques entre les deux pays pourraient même s’en trouver facilitées.

« Nous saluons les efforts sans précédent du président Trump pour organiser ce sommet historique entre la Corée du Nord et les Etats-Unis », avait déclaré le ministre nord-coréen des Affaires étrangères, Kim Kye Gwan, quelques heures à peine après l’annonce d’annulation de Washington. « Nous tenons à assurer une fois de plus les Américains de notre intention de trouver avec eux des solutions aux problèmes qui se posent, quel que soit le moment », a-t-il ajouté d’un ton si mesuré qu’il a surpris les Sud-Coréens.

Cette déclaration de l’un des plus proches conseillers du président Kim Jong.
Un témoigne d’un changement radical de politique et d’attitude. Non seulement la Corée du Nord n’a pas riposté par un discours belliqueux ou l’envoi d’un missile, mais elle a aussi exprimé une volonté sans précédent à engager des négociations.

Toutefois, le plus remarquable dans les propos de Kim Kye Gwan, c’est qu’il ait qualifié de « courageuse » la décision de Donald Trump d’envisager un sommet historique entre la Corée du Nord et les Etats-Unis. « Nous espérons que la ‘méthode Trump’ mettra fin à nos inquiétudes et aux siennes, et qu’elle permettra de satisfaire nos exigences et de travailler efficacement à résoudre les problèmes », avait ajouté le ministre.

« Une très bonne nouvelle »

Cette déclaration est d’autant plus surprenante qu’elle a été faite très peu de temps après l’annonce surprise de Donald Trump. Le président américain lui-même a laissé la porte ouverte à de futurs pourparlers, invitant Kim Jung Un à ne pas hésiter à lui téléphoner ou lui écrire s’il « [change] d’avis sur ce sommet très important ».

Il s’est ensuite réjoui sur Twitter de la « très bonne nouvelle » que représentait la « déclaration cordiale et productive de la Corée du Nord », ajoutant: « Nous verrons où cela nous mène. Avec un peu de chance, à une paix et à une prospérité durables. Seul l’avenir (et le talent) nous le diront ! » Enfin, face à la presse, qui assistait au retour sur le sol américain d’un prisonnier retenu pendant deux ans au Venezuela, le président des États-Unis a effectivement expliqué qu’il croyait toujours à la tenue de l’événement. « Ça avance très bien. On vise le 12 juin à Singapour. Ça n’a pas changé », a déclaré Trump.

La reprise des négociations paraît donc possible. Néanmoins, cela dépendra principalement des prises de position et des actions à venir des deux pays.

Les pires scénarios évoqués

Peu après l’annulation du sommet, les pires scénarios avaient été évoqués: la Corée du Nord répondrait par un tir de missile, et les Etats-Unis réagiraient en durcissant les sanctions et en envisageant une riposte militaire. Cette fois, pourtant, Kim Jong Un a fait marche arrière. Kim Yong Hyun, professeur à l’Université Donggkuk (Corée du Sud), a déclaré à l’agence de presse Yonhap qu’il était « significatif que la Corée du Nord ouvre la voie au dialogue, afin qu’une rencontre avec les Etats-Unis puisse avoir lieu si jamais leur relation de méfiance réciproque à court terme venait à s’apaiser. »

Comme le souligne Nam-sik In, professeur à l’Académie diplomatique de Corée du Sud, « la Corée du Nord a au moins montré qu’elle ne voulait pas rompre les négociations. Nous espérons donc que les problèmes se règleront sur le long terme ».

Cette volonté de maintenir le dialogue est clairement présente dans le discours du ministre Kim Kye Gwan: « La regrettable annulation du sommet prouve que l’antagonisme entre la Corée du Nord et les Etats-Unis est profondément enraciné. Cela montre à quel point ce sommet est nécessaire pour réconcilier nos deux nations. »

Trump a gagné son pari

En fin de compte, l’annulation inattendue du sommet par Donald Trump a été un tournant décisif qui a poussé la Corée du Nord à reconsidérer sa position « intransigeante ». Elle a aussi démontré que les Etats-Unis dominaient la partie.

Le choix de Donald Trump d’annuler les pourparlers semble calculé. Il l’a annoncé dans un document officiel portant sa signature, plutôt que sur Twitter ou lors d’une conférence de presse. Le secrétaire d’Etat américain, Mike Pompeo, était impliqué dans le processus. Outre le ton et le contenu du message, cela signifie que cette décision a été mûrement réfléchie.

Bien entendu, l’amour-propre du président n’est sans doute pas étranger à cette volte-face. Tony Schwartz, coauteur de Trump par Trump, a confié au Washington Post que le chef de l’Etat avait annulé l’événement pour protéger son « ego ». « Donald Trump a terriblement peur d’être humilié ou que l’on se moque de lui », estime M. Schwartz. « Dans cette affaire, il s’agit de montrer qui est le plus fort. Le président craint donc particulièrement d’apparaître faible et diminué. Il n’y a rien de pire à ses yeux. »

Une position dominante pour les Etats-Unis

Lorsque le sommet aura finalement lieu, les Etats-Unis se retrouveront dans une position dominante, puisqu’ils auront déjà démontré qu’ils sont capables d’annuler la rencontre si la Corée du Nord ne joue pas franc jeu. Cela devrait aussi peser dans les négociations sur la dénucléarisation.

Cette annulation pourrait également faire taire une partie des critiques du président aux Etats-Unis. Jusqu’ici, les experts lui reprochaient d’avoir « accepté ce sommet dans la précipitation » et jugeaient qu’il y avait peu de chances de voir la Corée du Nord renoncer à l’arme nucléaire à l’issue des pourparlers.

Ils doivent à présent revoir leur copie. En exprimant de façon constante sa volonté de dialoguer avec les Etats-Unis dans un « esprit d’ouverture », la Corée du Nord a prouvé son intention de s’engager plus activement dans les négociations. Si le dialogue reprend bel et bien, il y a de grandes chances pour que Donald Trump obtienne plus facilement un consensus.

La Corée du Nord semble en effet avoir changé assez vite d’attitude. Nous pouvons dire sans trop nous avancer que la situation n’est pas aussi terrible que prévu. Dans un éditorial intitulé Il est encore temps de faire revivre la diplomatie, le New York Times pense même que le président « a pris la bonne décision en s’éloignant de l’orthodoxie du Parti républicain pour développer des relations diplomatiques avec la Corée du Nord et en acceptant, sur un coup de tête, de rencontrer M. Kim le 12 juin à Singapour ».

Evidemment, l’ego de Donald Trump était en jeu et ses saillies verbales, comme lorsqu’il s’est vanté sur Twitter d’avoir un « plus gros bouton nucléaire » que Kim Jong Un, ont parfois semblé à deux doigts de déclencher un conflit mondial. Néanmoins, il a amené le dirigeant nord-coréen à faire une nouvelle concession.

Donald Trump a été sévèrement critiqué pour son attitude vis-à-vis de la Corée du Nord mais les Sud-Coréens ne peuvent qu’espérer voir les deux dirigeants actuels les plus imprévisibles parvenir tant bien que mal à un accord. Bien qu’il y ait des milliers de raisons de ne pas les aimer et de se méfier d’eux, les choses semblent évoluer dans le bon sens.

Cet article, publié à l’origine sur le HuffPost sud-coréen, a été traduit par Iris Le Guinio pour Fast For Word.

Source www.huffingtonpost.fr

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