Meyer Habib : “La France doit changer de logiciel politique”

0
366

Notre député à l’Assemblée nationale française ne trouve pas de repos. Actes antisémites, politique anti-israélienne, articles de journaux ou reportages biaisés qui risquent d’entrainer des actes antisémites. Ce cercle infernal, Meyer Habib ne cesse de le dénoncer et agit autant que faire se peut, pour faire entendre une autre voix, faire ouvrir les yeux à ceux qui ne veulent pas voir.

LPH l’a interrogé afin de prendre la température dans les sphères de la décision publique française. Où en est-on quant à la prise de conscience d’un communautarisme délétère et d’une montée en puissance et passée souvent sous silence de la violence islamiste? Peut-on espérer voir un changement dans le traitement médiatique d’Israël et dans la prise en compte des problématiques de la communauté juive?

Le député nous répond avec la passion et le franc-parler qui le caractérisent. 

Le P’tit Hebdo: Vous avez manifesté votre vive désapprobation face au documentaire diffusé sur France 2 sur Gaza. L’ambassadrice d’Israël en France aussi, les associations communautaires ont organisé une manifestation. Tout cela n’a pas empêché la diffusion prévue. N’était-ce pas un combat perdu d’avance?

Meyer Habib: Aucun combat n’est perdu d’avance. Ce combat est juste, mais difficile. Il faut le mener sans relâche. Israël a évidemment le droit légitime de protéger sa frontière. Quel Etat digne de ce nom accepterait que des hordes barbares envahissent son territoire dans le but assumé d’égorger le maximum de civils ?

Je le disais à Marseille il y a quelques jours encore, il existe une schizophrénie médiatique : on compatit avec les Juifs quand ils portent des pyjamas à rayures ; on les exècre quand ils portent l’uniforme.

Dois-je rappeler qu’Israël s’est retiré de 100% de la Bande de Gaza en 2005, renonçant au Goush Katif, véritable paradis sur terre ? Ce sacrifice a-t-il permis d’obtenir la paix ? Non ! Car ce conflit n’est pas un conflit territorial, c’est un conflit de civilisation. Le but du Hamas n’est pas d’établir un Etat palestinien à côté mais à la place d’Israël.

Ensuite, j’accuse les médias de jeter de l’huile sur le feu et d’importer en France le conflit israélo-palestinien. Dans la France du XXIème siècle, la haine d’Israël tue. 13 Français juifs assassinés parce que juifs depuis 2003. En France, 51% des actes racistes sont dirigés contre des Juifs, alors qu’il représente moins de 1% de la population. Je n’ai de cesse de le répéter, en déchaînant la détestation d’Israël, on prépare le prochain attentat antisémite.

18 ans après la funeste affaire Al-Dura, France 2, service public audiovisuel, s’obstine avec ce reportage d’Envoyé spécial, à criminaliser Israël, déshumaniser Tsahal et à relayer l’ignoble propagande islamiste.

Ces journalistes pensent-ils sérieusement qu’une telle ligne éditoriale puisse faire avancer la paix ? L’effet est exactement inverse et ce parti pris est irresponsable alors que plus de 250 innocents ont été massacrés en France depuis 2015 par des djihadistes. A-t-on oublié que les terroristes de Toulouse et de l’HyperCacher ont directement invoqué le conflit israélo-palestinien pour justifier leurs crimes ?

Lph: L’un des arguments avancés contre la diffusion de ce reportage était le risque d’attiser la haine antisémite en France, déjà bien trop présente. Lors de la manifestation des membres de la communauté juive française, des drapeaux d’Israël ont été brandis. N’encourageons-nous pas ainsi l’amalgame que nous dénonçons? De mise en garde contre les retombées d’un tel reportage sur la communauté juive française, cette manifestation ne se serait-elle pas transformée en manifestation de soutien au gouvernement israélien? 

M.H.: Je n’étais pas à cette manifestation mais je comprends parfaitement et partage l’écœurement de tous ces amis d’Israël, qu’ils soient de la communauté juive, ou pas !

Je revendique haut et fort le droit des Français juifs de proclamer leur solidarité avec Israël et brandir le drapeau bleu-blanc. Beaucoup y ont des attaches familiales et le sionisme fait partie intégrante de l’identité juive.

Aujourd’hui Israël est l’unique certificat d’assurance-vie du peuple juif dans un contexte de montée en puissance d’un nouvel antisémitisme et la seule garantie qu’il n’y aura pas une deuxième Shoah.

Il n’y a aucune contradiction à aimer la France et Israël ! Au contraire ! Dois-je rappeler que chaque Shabbat, nous récitons une prière pour la République française dans nos synagogues ? S’il existe des divergences politiques, sur le fond, la France et Israël partagent les mêmes valeurs et sont du même côté dans le combat contre le totalitarisme islamique. Les Français juifs ont le devoir moral d’assumer cette double fidélité.

Lph: Vous témoignez souvent du nombre croissant d’hommes et de femmes politiques qui vous tendent une oreille attentive et qui commencent à réfléchir à la vision biaisée qu’ils peuvent avoir du conflit israélo-palestinien. Qu’en est-il du milieu médiatique? Comment faire évoluer les mentalités?

M.H.: Effectivement, un nombre croissant de politiques issus principalement des rangs de la droite commencent à comprendre que la France et Israël sont dans le même camp contre l’Islam politique. J’ai eu l’occasion, ces dernières années, d’accueillir en Israël des dizaines d’élus, désireux de découvrir le modèle israélien de lutte anti-terroriste et les ressorts de la « start-up nation ». Parmi eux : Valérie Pécresse, Christian Estrosi, Claude Goasguen, Eric Ciotti, Guillaume Larrivé et bien d’autres mais aussi les ministres Bruno Le Maire, Sébastien Lecornu ou Franck Riester.

A quelques rares exceptions, comme le député de Sarcelles François Pupponi, la gauche reste animée par une véritable obsession anti-israélienne. Je ne parle pas, hélas, seulement de l’extrême-gauche, prête à toutes les compromissions avec les Islamistes, mais aussi, de plus en plus, de la majorité LREM…

Claude Goasguen et moi avons ainsi écrit en mai dernier à Christophe Castaner, ex-patron de LREM, avec copie au Président de la République. En cause : la multiplication de prises de position très agressives et hostiles à Israël de la part d’élus de la majorité présidentielle. Certains sont allés jusqu’à demander des sanctions, voire un boycott d’Israël ! Le Chef de l’Etat m’a répondu, pas le nouveau Ministre de l’Intérieur…

Côté médias, je n’attends pas grand-chose. Une véritable idéologie médiatique s’est imposée depuis des décennies, victimisant systématiquement les Palestiniens. Ainsi, le 17 octobre, pas un mot sur les roquettes gazaouïes lancées sur Beer-Sheva, en revanche, on s’appesantit sur la riposte d’Israël, qui frappe des positions terroristes.

Ce biais incite les dirigeants palestiniens à persévérer dans la politique du pire et exaspère la haine d’Israël et la violence antisémite en France… Je n’ai de cesse de le dénoncer. Conséquence, je suis boycotté par certains médias officiels.

Lph: La haine du juif que vous dénoncez à maintes reprises en France trouve, à 99%, son origine dans l’islamisme. Constatez-vous, vous aussi, une montée de cet intégrisme en France? Le discours de départ de Gérard Collomb était édifiant sur ce plan… Va-t-on enfin voir une réaction politique à la hauteur des problèmes? 

M.H.: Vous avez raison. Aujourd’hui, je ne suis pas du tout inquiet pour Israël, je suis très inquiet pour la France. Ce nouvel antisémitisme « des quartiers » est un symptôme qui ne trompe pas. Les nouveaux antisémites préfèrent le keffieh à la croix gammée, la quenelle au salut hitlérien. Excités par des médias complices, ils se nourrissent d’islamisme, de complotisme, de détestation d’Israël et de la France.

Ouvrons les yeux : ce nouvel antisémitisme n’est donc qu’une variante de la haine de la France. Dans ces « territoires perdus de la République », on a sifflé des minutes de silence, on ne peut plus enseigner la Shoah, « juif », « français », « blanc » sont devenus des insultes.

Je pense qu’une certaine prise de conscience s’est opérée chez certains, principalement à droite, mais ce n’est pas suffisant.

Un exemple révélateur est l’affaire des concerts du rappeur « islamo-racaille » Médine au Bataclan ! J’ai interpellé le Ministre de l’Intérieur le 27 juillet pour faire annuler ce spectacle programmé 3 ans, presque jour pour jour, après l’attentat du 13 novembre, où 90 personnes ont été massacrées.

On marche sur la tête ! Comment ne pas comprendre l’indécence d’un tel spectacle, qui est une véritable injure aux victimes et une gifle à la République ? Et pourtant, j’ai été conspué par la gauche et des députés LREM…

Lph: Edouard Philippe, puis Emmanuel Macron, ont, successivement, annulé leur visite en Israël. Savez-vous pourquoi? Une autre date a-t-elle été prise entre Binyamin Netanyahou et Emmanuel Macron? 

Lph: Je regrette évidemment ces décisions du Président de la République et du Premier ministre, dont je crains qu’elles ne soient liées à un certain contexte de lynchage politico-médiatique.

Je me suis longuement entretenu en tête-à-tête avec Emmanuel Macron, qui m’a reçu à l’Elysée le 14 septembre. Il m’a, entre autres, confirmé qu’il se rendrait l’an prochain en Israël et précisé qu’à sa demande, Edouard Philippe le précéderait fin 2018 pour préparer sa venue.

Ces visites offrent l’occasion de réchauffer une relation bilatérale mise à mal par les condamnations très dures adressées par la France à un Israël en légitime défense sur la frontière gazaouie.

Le blocage réside dans la ligne pro-arabe persistante du Quai d’Orsay. A cet égard, je suis en train de mettre au jour un nouveau scandale : des milliers de Français d’Israël auraient été rayés ces derniers mois en catimini des listes consulaires. Si c’était avéré, j’aurai l’occasion d’y revenir.

Mais plus généralement, la France doit changer de logiciel politique et comprendre que jamais un Juif ne sera un colon à Jérusalem, en Judée ou en Samarie ! Que plus jamais Jérusalem ne sera partagée et restera pour l’éternité la capitale indivisible d’Israël et du peuple juif. Que jamais les implantations de Judée-Samarie ne seront démantelées. Aucune politique étrangère sérieuse ne peut s’appuyer sur une négation des faits ou une falsification de l’Histoire.

Les autres pays démocratiques le comprennent, pourquoi pas nous ?

Propos recueillis par Guitel Ben-Ishay  –  lphinfo.com

Aucun commentaire

Laisser un commentaire