Il est temps de s’occuper du Néguev et de la Galilée

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Par Jacques BENILLOUCHE – Temps et Contretemps

Il était temps que l’on s’occupe plus d’Israël et moins de la Cisjordanie et que l’on réoriente les investissements vers le centre du pays. Nous l’avons souvent écrit qu’avant de peupler les zones au-delà de la Ligne verte, il était indispensable d’équilibrer deux régions d’Israël où la population arabe est majoritaire. Le Néguev est occupé par de nombreux Bédouins dans des villages qui leur sont entièrement dédiés tandis que la Galilée est historiquement une terre arabe et chrétienne. Il semble qu’à présent le nouveau gouvernement se soit rendu compte de l’importance d’une situation qui ne doit pas perdurer. Il va donc proposer des avantages significatifs aux Juifs pour les pousser à s’installer dans ces zones, avec à terme la création de villes pour attirer de nouvelles populations et des nouveaux immigrants afin de désengorger le centre du pays.

Il est étonnant que les nouveaux accords de coalition signés avec l’extrême-droite prévoient une judaïsation poussée de la Galilée et du Néguev alors que jusqu’à présent la zone de prédilection restait les implantations de Cisjordanie. Il n’est pas nécessaire d’être expert politique pour constater que ces zones ont été abandonnées aux populations indigènes. Bezalel Smotrich et Itamar ben Gvir ont effectivement convenu de renforcer l’installation de Juifs au Nord et au Sud d’Israël. On ignore dans le détail les mesures qui sont prévues mais des avantages économiques seront proposés aux Juifs qui choisissent l’aventure ce qui implique la nécessité d’envisager la création de nouvelles structures. Le pays dispose de nombreuses terres domaniales qui pourraient être attribuées à des zones juives par le nouveau ministre des Finances, Bezalel Smotrich qui a droit de regard sur l’Autorité foncière israélienne.

Le Néguev (notre photo), en particulier, est une région semi-désertique du sud d’Israël avec pour capitale administrative Beer-Sheva (210.000 habitants) et à l’extrémité sud le port d’Eilat. Les précédents gouvernements historiques avaient créé plusieurs villes de développement, Dimona, Arad et Mitzpe Ramon, ainsi que de petites villes bédouines, Rahat et Tel Sheva et Lakiya. Plusieurs kibboutzim existent toujours dont Revivim et Sde Boker.

Au fil du temps la région du Sud a acquis une nouvelle importance stratégique sur le plan économique et sécuritaire. Naftali Bennett avait déjà envisagé, depuis le sommet d’une colline de Rahat, de changer de stratégie dans la région en décourageant l’installation de bétail et de troupeaux de chèvres par les nomades. Il estimait que les implantations juives sont «l’avant-garde sioniste d’aujourd’hui». Les nombreux accords de paix avec les États arabes ont entrainé des projets stratégiques en partenariat avec les Émirats pour le transfert de gaz naturel à travers le Néguev vers l’Europe.

Les Arabes du Néguev accusent le gouvernement de vouloir les «déraciner» par diverses tactiques. Ils ont protesté contre un plan de reboisement dans leurs villages mené par le Fonds national juif (JNF), qu’ils considèrent comme un moyen de les priver de leurs terres. Ils ont accusé le gouvernement d’empêcher l’expansion des villages arabes et de les encercler par de nouvelles implantations juives.

Si le gouvernement poursuit son projet, il faudra s’attendre à de nouvelles contestations car la politique de l’ILA (Israel Lands Authority) sera dorénavant sous l’autorité de Ben Gvir, ministre de la Sécurité nationale. De plus, son parti recevra également le ministère du Développement du Néguev et de la Galilée qui contrôlera l’Autorité foncière d’Israël et donc la gestion de la plupart des terres d’Israël. ILA fournit des services pour le transfert des droits résidentiels et fonciers, le rezonage des terres et les permis pour les ajouts à la construction, les baux et la location de terres agricoles.

Les Arabes israéliens sont inquiets pour leur avenir. Sur les deux millions de citoyens arabes, 300.000 d’entre eux vivent au Néguev. Par ailleurs, près de 500.000 Arabes, musulmans ou chrétiens, peuplent la Galilée. Il y a également une importante population druze ainsi que des communautés de Bédouins, de Maronites et de Circassiens. Les autres Arabes vivent dans des villes mixtes, Haïfa, Nazareth, Lod, Ramla, Jérusalem, Jaffa, Akko, et Nazareth Illit.

Cette politique n’est pas nouvelle. Une politique d’implantation, le programme des «mitzpim», avait été menée par les Israéliens en Galilée à la fin des années 1970. Ce programme a vu la création, sur le haut des collines galiléennes, d’une trentaine de petits villages résidentiels juifs (les mitzpim). Plusieurs décennies plus tard, les mitzpim sont devenus de cossus villages urbains qui accueillent en moyenne une centaine de familles, recrutées au sein de la portion la plus élitiste de la classe moyenne juive-israélienne. On est revenu aux fondamentaux à savoir l’appropriation et la mise en valeur de la Terre d’Israël pour consolider l’assise territoriale de l’État. Mais les Israéliens se sont déplacés en majorité vers les régions urbaines, transformant la Galilée en principal bassin de peuplement des Arabes israéliens. Il était donc temps de créer des implantations avec pour objectif de renforcer la présence juive dans une région majoritairement peuplée d’Arabes israéliens.

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